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L’Œuvre désirante

La Poétique du mouvement

Un article de Jamel Eddine Bencheikh à propos de Gilbert Cosset

Tout vient d’une oscillation, de rencontres involontaires. L’acte de peindre prend dans une relation. Il ne restitue pas d’images, il aboutit à elles. Rien ne donne forme définitive, ne se fixe dans l’irrémédiable. Sa fluidité est laissée à la matière. La toile est un espace ouvert où se révèlent et se transforment des sensations. Ainsi se préparent des séquences, des séries de mouvements dont chacun trouve une cohérence et une continuité. La couleur intervient pour donner une direction nécessaire, traduire un désir particulier. Il ne s’agit pas d’un ordre mais d’un rythme à communiquer. Les mots s’associent au travail. Le couple sol-soleil, par exemple, lie la sensation dans une approche spontanée.
La série peut s’assombrir lorsque les noirs et les bleus profonds vibrent d’une image pathétique. A quel torrent grisâtre, rongeant une terre ténébreuse, un nageur essaie-t-il d’échapper en cassant son bras mutilé vers un ciel d’anxiété ? Vers quelle délivrance plonge cette forme effilée qui traverse une toile où la mer et la nuée se disputent le vide ? Comment orienter la composition pour décider de l’équilibre des formes ou de leur suspension désespérée ? Fusains, pastels et huiles recherchent, pour une mer bleue, des contraires nés des mêmes trajets. La tragédie ne se noue-t-elle pas sur les mêmes lieux que le soleil ou la joie ? A l’inverse, le jaune ou le bleu peuvent jaillir au cœur de la série noire. Car il n’y a pas de bonheur en soi, de peinture en soi. Il n’est que des moments, des éclairages. Tout recommence à partir du même.

Jamel Eddine Bencheikh, Extrait de L’Œuvre désirante, Editions Les Ateliers du Père Lachaise associés


Voir en ligne : Informations sur Bencheick : babelio

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